Enfin, Martin Barré, figure essentielle de la scène artistique de la seconde moitié du XXe siècle, est mis à l’honneur dans cette première exposition d’envergure qui retrace, à partir d’œuvres représentatives de chaque période, son entreprise picturale chronologique, qui relève tant d’une création conceptuelle et visuelle, que d’une mise en forme de pensée.
Dans l’attente, de sa rétrospective au Centre Pompidou, à l’automne 2020, qui ne reprendra que 6 tableaux.
Après des études en architecture puis en peinture à l’École des Beaux-Arts de Nantes, Martin Barré s’installe définitivement à Paris au tournant des années 1950.
Des expositions personnelles et collectives en 1954 et 1955 marquent ses débuts sur la scène artistique parisienne. Abandonnant le langage de ses années de formation, il développe dès lors une œuvre abstraite singulière entreprise à laquelle il se consacra avec rigueur et inventivité pendant les quatre décennies suivantes et jusqu’à son décès en 1993.
D’une extrême cohérence, son oeuvre est généralement divisée en cinq périodes :
Entre 1954 et 1962, ce premier moment est dédié à l’abstraction de l’après-guerre. L’utilisation d’une palette restreinte où dominent les blancs, les bruns et les noirs, rehaussés de touches de jaune de Naples, terre de Sienne ou bleu de Prusse.
Entre 1963 et 1967, il élabore un corpus pionnier dans l’histoire de la peinture contemporaine en recourant à la bombe aérosol pour créer des tableaux qui mettent en scène l’inscription du geste et du temps sur la toile. La Série « les Zèbres » se déploie sur des formats très variés, avec des modalités de recouvrement de la toile très différents, explorant les modalités du « all-over », testant les limites physiques et visuelles de la toile, assurant des effets de différence dans la répétition.
Les années 1969 à 1971 sont définies comme étant son épisode conceptuel, et lui donnent l’occasion de s’essayer aux possibilités conceptuelles de la photographie et de l’exposition comme œuvre. Une manière de poursuivre par de nouvelles voies son examen du médium pictural et de ses conditions d’apparition. Il expose à deux reprises à la galerie Daniel TEMPLON.
En 1972, c’est son retour à la peinture qui ouvre une période de 20 années de création, il travaille le processus de structuration du tableau, avec un quadrillé de grilles rendues visibles par inscriptions, marquages, et recouvrements successifs.
Entre 1979 et 1992, c’est une réflexion croisée sur la couleur et la combinatoire qui domine sa démarche. L’ultime série de l’artiste réalisée en 1992, reprend des formes géométriques colorées, « montant » ou « descendant » des bords supérieurs et inférieurs pour se confronter à la surface blanche du tableau, qui n’est pas un fond, mais bien une composante de l’espace pictural.
« Travaillant par séries, Martin Barré prend en charge l’ensemble des paramètres picturaux pour libérer le potentiel dynamique, spatial comme mental de la peinture. Envisageant chaque tableau à la fois en lui-même et comme un élément en relation avec les autres œuvres de la série auquel il appartient, Martin Barré mène un travail précis, quasi linguistique, où la question de la formation du tableau est première, où s’élaborent des articulations choisies entre couleur des réserves, premier et arrières plans, l’espace pictural et sont hors champ, la transparence et la bordure. »