Quelles sont vos influences ?
J’ai grandi dans une famille de plasticiens, mes parents étaient enseignants d’arts-plastiques et organisaient dans les années 80, des évènements d’art contemporain au Mans.
Élèves tous deux de Claude Viallat à l’Ecole des Beaux Arts de Marseille dans les années 70, ils m’ont permis de connaître de près le travail plastique et intellectuel des artistes du mouvement Support-surface. Mouvement dont l’influence est toujours présente dans mon approche artistique, notamment à travers mes choix formels et matériologiques.
De plus, les évènements qu’ils organisaient et les artistes qu’ils côtoyaient, ont accompagné mon enfance et mon adolescence. Gina Pane, Fred Forest, Marie-Jo Lafontaine, François Boisrond, Keith Haring, Dominique Gauthier, Richard Monnier… tous ces artistes et leurs œuvres ont habité et construit d’une manière ou d’une autre mon univers. Très tôt je me suis destiné à une vie tournée vers la création.
Vos obsessions ?
Je suis continuellement habité par mon travail, et particulièrement par les œuvres en cours de réalisation, celles que je dois finir. Elles m’obsèdent !
L’acte de création, toujours imprévisible et tumultueux, tient de l’aventure. Le décalage entre ce que je prévois de faire, et ce qui se réalise effectivement, est un ingrédient majeur de la création. C’est une source de préoccupation et d’anxiété, mais dans le même temps cela produit toujours de l’inattendu, de la surprise. C’est seulement une fois l’œuvre aboutie, qu’on voit clairement ce que l’on avait à faire, et s’ouvrent ainsi les possibilités de prolongement à travers d’autres processus, d’autres créations.
Parlez-nous de l'une de vos réalisations ou expositions dont vous êtes le/la plus satisfait(e) et/ou qui vous a rendu(e) heureux(se)
Certaines de mes expositions éclairent plus que d’autres mon travail, en tout cas certaines scandent fortement mon parcours, avec tout ce que cela comporte de continuités, de ruptures et parfois d’impasses.
Par son orientation plus radicale, mon exposition à Galerie Jousse Entreprise à Paris en 2014 intitulée « Storage » , marque une sorte d’aboutissement dans mes recherches sculpturales. L’exposition « Fault Line » au Centre d’art Eleven Steens à Bruxelles en 2019, manifeste quant à elle, un retour à la couleur et à la « peinture », masquée pendant un temps par d’autres préoccupations.
Mais celle que je retiendrais parmi toutes, est ma première exposition en galerie : « Peinture en Kit » organisée à la Galerie Jérôme de Noirmont en 2003. Elle présentait des oeuvres faites de dizaines de milliers de punaises colorées installées directement sur les murs. Les œuvres étaient disponibles sous formes de kit, de simples boîtes en carton contenant tout le nécessaire à leur réalisation : un manuel de montage, un patron, des punaises et des outils de fabrication. Cette exposition pointait de manière particulière la manière dont j’allais appréhender la création par la suite, avec une certaine dimension ludique (il y a toujours du jeu dans mon travail) doublée d’une dimension critique.
Emmenez-nous Quelque part
S’il fallait que je vous emmène quelque part, ce serait indéniablement en Haute-Loire, dans un lieu qui marque fortement mon histoire. Dans les années 90, mes parents ont acheté une ferme abandonnée sur les plateaux du Livradois-Forez, en pleine nature au milieu des montagnes et des forêts de pins. Avec ma famille, nous passions nos temps de vacances à la rénover.
Pendant plus de quinze ans, nous nous sommes improvisés charpentier, couvreur, maçon, plâtrier, soudeur, menuisier, électricien… quelquefois même bûcheron. Le plus éprouvant était de porter des pierres et morceaux de roches, que nous empilions et emboîtions tant bien que mal afin de construire des murs en pierres sèches ; ceci en éprouvant dans la dépense physique et les savoirs acquis, une sorte de satisfaction. Pour mes parents, ces activités avaient le sens d’un apprentissage et d’une réalisation personnelle, c’était gagner une sorte d’autonomie et d’indépendance à travers l’acquisition de savoirs pratiques. C’était déjà une manière d’apprendre par la pratique et l’expérimentation, à partir des matériaux, d’en découvrir les potentialités et les limites, points de départ de ce qu’est pour moi la création artistique.
Legende Photo :
Exposition personnelle ” Variations concrètes ” à la Galerie Bertrand Grimont – Mars à Mai 2020 – Crédit : Romain Darnaud